La bombe jeune en passe d'être dégoupillée!
Les jeunes représentent près de 70% de la population camerounaise. Toujours présentés comme le fer de lance de la nation, ils ploient pourtant sous le poids du chômage et d’un désœuvrement indescriptibles. Ils représentent un véritable volcan en ébullition.
Parlant des jeunes, Christian Cardinal Tumi a estimé dans une interview accordée à Germinal, le 22 août 2016 que « près de 70% des Camerounais ne sont pas gouvernés. […] Il faudrait qu’il y ait une alternance dans la gouvernance. Que l’on ait un chef de l’État très proche des jeunes et qui parle le langage qu’ils comprennent. Si on donne le pouvoir aux jeunes, ils peuvent révolutionner ce pays. Les jeunes actuellement ont besoin du pouvoir politique.?» S’ils étaient donc détenteurs du pouvoir politique, ces jeunes seraient bien placés pour comprendre leurs problèmes et parler le langage de cette catégorie de la population qui est caractérisée, selon le Bureau central des Recensements et des Études de Population (Bucrep), par son extrême jeunesse. Selon cette institution, la moitié de la population a moins de 18 ans. L’âge médian est de 18 ans dans l’ensemble de la population, 18,3 ans chez les femmes et 17,1 ans chez les hommes. La population du Cameroun est estimée à 23 248 044 d’habitants en 2017, dont 16 273 631 ayant moins de 40 ans, soit environ 70% de la population globale.
Relativement à la population jeune vivant en zones urbaines, le taux de chômage est estimé à 76% et le Bureau international du Travail estime que le nombre de jeunes qui arrivent sur le marché de l’emploi est de 70%, ce qui correspond au taux de sous-emplois, qui lui est plus criard est de 70%, si on s’en tient aux données du Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (Dsce).
C’est une lapalissade : la jeunesse broie du noir, victime d’une ma l-gouvernance et d’une mauvaise répartition des fruits de la croissance. Les jeunes, diplômés ou non, dans leur immense majorité, n’ont pas d’emplois au Cameroun. Pour survivre, ils ont investi les métiers informels divers. Ils sont vendeurs à la sauvette (« sauveteurs »), mototaximen, gardiens de nuit, laveurs de voitures, vendeurs à la criée, etc. Désœuvrés, certains parmi eux n’hésitent pas à commettre et à vivre de petits larcins ou à devenir des bandits de grand chemin, quand ils ne se spécialisent pas dans la vente de la drogue et/ou des organes humains.
Il suffit de sillonner les rues des grandes métropoles, de jour comme de nuit, pour se rendre compte du péril jeune qui menace le Cameroun. Les autorités publiques donnent l’impression qu’ils sont conscients de cette situation. C’est visiblement pourquoi pour résorber le chômage des jeunes, le chef de l’État, Paul Biya, dans son message à la jeunesse à l’occasion de la célébration, le 11 février 2017, du 51e anniversaire de la fête de la jeunesse, s’est félicité de « l’entrée en application du Plan triennal « Spécial jeunes » doté de 102 milliards de francs CFA appuiera un million et demi de jeunes âgés de 15 à 35 ans, au rythme de cinq cents milles par an, dans divers domaines d’intérêt tels que l’agriculture et l’économie numérique. ». De telles initiatives avaient déjà prises et avaient abouti, par exemple, au recrutement de 25 000 jeunes dans la fonction publique camerounaise.
Malgré cette volonté affichée de solutionner les problèmes d’emploi des jeunes, les efforts sont largement en deçà des promesses faites, du potentiel économique du Cameroun et des espoirs suscités par Paul Biya dès son accession à la magistrature suprême. De sorte que les propos des évêques tenus à Maroua en janvier 2009 lors de leur 33e séminaire restent d’actualité. Eux qui, tout en dénonçant le monnayage dans les recrutements et les concours, avait tiré la sonnette d’alarme face à l’aggravation de cette gangrène en déclarant que « Le sort de tant de jeunes chômeurs après de brillantes études est pour [eux] aussi un sujet de préoccupation majeure. »
Pour que les choses changent dans le sens de la résolution du problème du chômage des jeunes, il faut et il suffit que les jeunes prennent conscience de leur pouvoir, soit en s’inscrivant massivement sur les listes électorales afin de choisir le moment venu celle ou celui qui peut trouver des solutions concrètes à leurs problèmes, soit en mobilisant dans les rues (« un million de jeunes pour l’emploi ») afin d’exiger une bonne gouvernance et l’amélioration de leurs conditions de vie. Les exemples burkinabè et sénégalais sont une illustration patente du pouvoir des jeunes.
Junior Etienne Lantier.
Cameroun, 2017-2018: Zone de fortes turbulences; Tout est prêt pour que tout explose - La bombe jeune en passe d'être dégoupillée!
Page 6 sur 10