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Mouangue Kobila réplique, Roger Kaffo Fokou fait une mise au point - Page 2

Mouangue Kobila réplique, Roger Kaffo Fokou fait une mise au point - Page 2

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Index de l'article
Mouangue Kobila réplique, Roger Kaffo Fokou fait une mise au point
La mise au point de Roger Kaffo Fokou
Ultimes précisions à Roger Kaffo Fokou
Ultimes précisions de Roger Kaffo Fokou au Pr James Mouangue Kobila
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La mise au point de Roger Kaffo Fokou
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt la réaction du Pr Mouangue Kobila à la tribune que j’ai rédigée en rapport avec son communiqué sur les incidents de Deido. Je note qu’il n’essaie pas de jeter de l’huile sur le feu, et cela contribue à rassurer. Il a pu se laisser aller un instant dans le feu de l’émotion et toutes les explications qu’il donne a posteriori permettent de comprendre ses propos précédents mais ceux-ci demeurent, à mon sens, non justifiés.
Le professeur peut être rassuré, sa tribune sur l’affaire du plagiat l’opposant au Pr Maurice Kamto était bien passée et avait trouvé une énorme sympathie de la part de tous ceux qui connaissent un tant soit peu notre système universitaire. Mais il s’agissait d’une affaire déjà pendante devant les autorités judiciaires et, présomption d’innocence oblige, il a semblé à beaucoup – et j’en suis -  plus décent d’attendre le verdict pour dire au fautif chacun sa manière de voir. Le fait qu’on l’ait trouvée, - c’était mon cas et je n’étais pas sur la question sur la même longueur d’ondes que nombre de mes amis - lui la présumée victime sympathique ne constituait en aucun cas un argument de droit en sa faveur, de même que ses révélations fort documentées et qui ont contribué à dessiner un début de portrait peu sympathique au présumé bourreau ne suffisaient pas non plus à condamner a priori  ce dernier. Le Pr Mouangue Kobila peut être certain que l’issue des joutes prétoriennes consécutives à ce dossier est attendue impatiemment des intellectuels de ce pays et l’on peut parier que le fautif (ou perdant) quel qu’il soit ne sera pas protégé par sa tribalité.
Quand je relis l’exercice d’explication de texte auquel le Pr Kobila vient de se livrer, un peu tard il faut le dire, je me dis qu’il s’est lui-même rendu compte de ce que son propos, jeté tel quel dans une situation en ébullition, n’aurait pu se comprendre sans l’aide d’un arrière-plan que lui seul pouvait fournir à son lecteur, et qu’il n’avait pas fourni jusqu’ici. En 24 h le dommage éventuel résultant d’une mauvaise interprétation de celui-ci - mauvaise interprétation favorisée par le caractère lacunaire de son texte - aurait pu être élevé. Le Pr Kobila est une éminente élite, ne lésinons pas sur les mots, un intellectuel je pense, et il doit pouvoir chaque fois mesurer la responsabilité sociale et intellectuelle qu’implique ce statut. Qu’il se soit laissé entrainer sur la mauvaise pente par des politiciens, lui l’homme de science, donne tout de même à réfléchir. La gangrène de l’ethnisme a fait et continue à faire de tels ravages dans notre pays que le devoir de tout intellectuel me semble être de faire comprendre, de manière claire et sans équivoque, que toute réponse tribaliste même bien intentionnée, même pour défendre une minorité menacée, ne peut à terme que desservir l’avenir de notre pays.
Les propos inqualifiables qui ont été tenus par M. Nzongang et compagnie et que rapporte le professeur heurtent profondément le citoyen camerounais que je suis, et ne me surprennent pas de la part de quelqu’un qui a longtemps montré qu’il n’était pas une lumière de la culture. En 2002 dans un opuscule que j’avais intitulé La Ronde des gladiateurs, je disais déjà de M. Nzongang, et pour moi cela est encore vrai : « J’ai fait l’effort de suivre les boniments de M. Nzongang pendant la dernière campagne pour l’élection présidentielle. Il m’est apparu qu’il est quelquefois facile de confondre la politique et les affaires. En tout cas, il est possible d’allier les deux. Jacques Attali disait que pour lui un homme d’affaires est celui qui vend ce qu’il n’a pas à quelqu’un qui n’en a pas besoin. N’est-ce pas là tout craché le portrait du candidat Nzongang à cette élection ? Car que pouvait-il bien vouloir vendre aux Camerounais ? Et de toutes les façons, ceux-ci avaient-ils besoin de la marchandise de celui-là ? ». C’est dire à quel point en modelant sa réaction sur l’action de M. Nzongang et compagnie le Pr Mouangue s’est mis en mauvaise compagnie… En ce qui me concerne, je suis convaincu que si d’aventure quelqu’un veut organiser un génocide dans notre pays aujourd’hui, à moins d’agir comme ce pape, le très saint Innocent III qui avait dit parlant des pauvres habitants de Béziers  « Tuez-les tous, Dieu choisira les siens », il lui faudra commencer par organiser des tests Adn pour éviter de massacrer ses propres « frères » de tribu.

Pour ce qui est du concept de « république », ce n’est pas parce que ce modèle est en train de ficher le camp en France que le rêve républicain hérité de la Rome antique a définitivement perdu de sa saveur. Il faut d’ailleurs rappeler que la France qui l’a remis au goût du jour en 1789 a commencé à le trahir dès le premier jour de la refondation, d’abord en France même dans le cadre d’une république bourgeoise hypocritement censitaire donc marchande, ensuite à l’étranger par la mise en œuvre d’une politique impériale en tous points contraire aux idéaux de liberté – égalité – fraternité. La France n’a pas servi la république, elle s’en est servie.  N’oublions pas que le problème auquel fait face cette France-là aujourd’hui est une résultante normale de la mondialisation à laquelle elle a puissamment contribué par l’impérialisme, et qui a ouvert ce pays comme bien d’autres aux grands courants du nomadisme qui labourent le monde actuel. Ce sont les difficultés économiques et leurs conséquences sociales qui exacerbent le mal vivre ensemble des Français aujourd’hui et cela devrait nous donner à réfléchir : une république de la pénurie où cent personnes doivent s’affronter pour un seul bout de pain ne peut que développer des réflexes communautaires puis infra-communautaires. Face à ces dérives, les élites intellectuelles doivent faire encore plus attention que par le passé aux diagnostics qu’ils proposent à une opinion travaillée par des tensions identitaires et irrationnelles.

Roger Kaffo Fokou, essayiste et poète