Les chantiers de l'inertie
Le divorce entre Paul Biya et les Camerounais semble consommé : au-delà de ses longs-courts séjours privés dispendieux en Europe et des biens mal acquis, Paul Biya paye d'avoir trahi la plupart de ses promesses. Le parcours de l'homme lion, des « grandes ambitions », des « grandes réalisations » et, pour tout dire, des grandes désillusions est une suite d’engagements non tenus. Gérer le Cameroun ou le transformer, Paul Biya a depuis longtemps fait le choix : Gagner du temps, faire le vide, jouer au mort et laisser pourrir. Il semble être né avec une passion de la politique et une ambition qu'aucun revers n'a jamais émoussé, qu'aucune humiliation n'a affaibli. Il a conquis son camp en forçant l'adhésion des aînés, contraints par la suite de se rallier par un mélange de crainte, d'admiration et de réalisme. Paul Biya a compris qu'avoir à sa disposition un parti puissant et organisé était la clé de tout, surtout si ce parti, Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) né des cendres de l'Union nationale camerounaise (UNC),
demeure administratif. Paul Biya est une bête de conquête et surtout de conservation du pouvoir. Il est moins fort dans l'exercice, mais semble avoir fait sienne la citation de Charles Pasqua : « les promesses des hommes politiques n'engagent que ceux qui les reçoivent. » C'est bien connu, les hommes politiques font beaucoup de promesses pendant les campagnes électorales. Mais, une fois au pouvoir, le principe de réalité s'impose à eux et certaines promesses ne sont pas tenues. C’est dire si Paul Biya ment comme tous les hommes politiques. Le chef de l'Etat du Cameroun a décrédibilisé la parole politique. Il ne fait pas ce qu'il dit et dit rarement ce qu'il fait. Il n’applique pas seulement le principe de réalité, il a fait de l’inertie, la réalité du principe. Tous les domaines de la vie nationale sont concernés : qu'il s'agisse de l'économie, de d'éducation, de la justice, des partis politiques, du code de la famille, des médias, du sport, du conseil constitutionnel, de l’article 66 de la constitution sur la déclaration des biens, de la loi sur les syndicats, de la Haute Cour de Justice, etc. Et dire qu’il y a plus de 2000 textes d’application des lois et règlements qui n’ont jamais été signés ! Germinal s'érige en notaire scrupuleux des promesses non tenues et des dossiers abandonnés.