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Politique Arrestations de Inoni et de Marafa: Joshua Osih indexe Paul Biya

Arrestations de Inoni et de Marafa: Joshua Osih indexe Paul Biya

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« Tous ceux qui ont mis ou continuent de mettre leurs génies et leurs énergies au service de celui qui incarne depuis 29 ans la monstruosité des forces conservatrices au sommet de l’État, devraient méditer sur ce qui s’est passé lundi dernier ».
Quatre jours après l’adoption du Code électoral inique par les députés de la majorité mal acquise du parti État, M. Biya vient d’ordonner l’arrestation de deux de ses ex-collaborateurs. S’il est constant que ces incarcérations qui interviennent au lendemain de cette mascarade participent d’une stratégie piteuse et mal voilée de diversion visant à distraire l’opinion publique sur ce code électoral qui est une véritable chambre à gaz électoral, il n’en demeure pas moins que cette affaire et bien d’autres auraient pu être évitées si ceux qui nous gouvernent avaient l’obligation de rendre compte.  Le fait de verrouiller une fois de plus et certainement une fois de trop le processus électoral n’améliorera donc pas la transparence dans la gestion des affaires publiques tant que le processus conduisant au choix

de ceux qui nous gouvernent ne sera pas juste, sincère et démocratique.
L’affaire de l’avion présidentiel pose dramatiquement le problème de la gouvernance judiciaire et surtout de la gouvernance au plus haut sommet de l’État.
Pour ce qui concerne la gouvernance judiciaire, la discrimination dans les interpellations et les incarcérations opérées dans les juridictions inférieures - qui décident en premier ressort de la mise sous les verrous- ne sauraient se justifier dans une République qui se respecte. Nous avons des personnes reconnues coupables de lourdes fautes de gestion qui sont libres alors que d’autres croupissent en prison sans jugement depuis plus de 4 ans. Et quand bien même elles sont jugées, il n’est pas sérieux que des accusations de détournements de 50 milliards FCfa au départ soient ramenées à moins de 100 millions FCfa dans les juridictions d’appel.
Pour ce qui concerne la gouvernance au sommet de l’État, il convient de rappeler que l’affaire de l’achat d’un nouvel avion présidentiel était à la base une initiative personnelle de M. Biya qui voulait s’offrir un avion privé pour ses déplacements. Dans un contexte marqué par les contraintes des plans d’ajustement structurel qui ne permettaient pas et qui ne permettent toujours pas au Cameroun de s’offrir un tel luxe, M. Biya, dans une roublardise érigée depuis longtemps en méthode de gouvernement, avait cru bon de détourner l’attention du Fmi en confiant l’opération à la Camair et à la Snh.
En 2002, les péchés liés à l’achat clandestin étaient déjà commis et connus. La question la plus importante est de savoir qui est le véritable responsable de ce détournement de deniers publics qui n’a pas commencé lors du partage du magot, mais plutôt quand l’argent a été débloqué des caisses de la Snh en dehors de toute règle budgétaire et à l’abri du regard des bailleurs de fonds. Soit M. Biya a été le donneur d’ordre du déblocage opaque des fonds des caisses  de la Snh et dans ce cas il est le principal responsable et acteur de ce faux grossier, soit cet argent a été débloqué sans son avis et ceux qui l’ont fait doivent répondre devant la justice.
Aucun responsable de la direction de la Snh à l’époque des faits n’a été interpellé jusqu’ici. Personne à l’époque des faits n’avait éventré les caisses de cette société. Le fait d’avoir par la suite nommé puis maintenu durant une dizaine d’années M. Inoni et M. Marafa respectivement Premier ministre chef de tout le gouvernement et ministre d’État chargé de l’administration territoriale et de la décentralisation, renforce le sentiment que M. Biya, que ses laudateurs présentent comme l’homme le plus renseigné du pays, est vraisemblablement le donneur d’ordre du déblocage des fonds des caisses de la Snh.
Et c’est en cela qu’il est manifestement le principal responsable de ce détournement. Ces postes sont habituellement confiés aux intimes et hommes sûrs du chef de l’État en raison de leurs positions sensibles dans la gestion de toutes les contradictions de l’administration publique. Vu dans ce sens, les sieurs Inoni Ephraïm, Marafa Hamidou Yaya, Atangana Mebara, Yves Michel Fotso et tous les autres protagonistes ne sont que des complices de ce détournement, au cas où leur culpabilité est avérée. On ne saurait écrouer les complices d’un délit aussi grave tout en laissant libre le principal responsable de l’opération qui, de surcroît, n’a pas été auditionné. Malheureusement dans notre pays l’initiative de l’interpellation, des auditions ou de l’incarcération appartient au monarque, ceci en violation flagrante du sacrosaint principe de la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Les juridictions en charge des instructions et des incarcérations sont aux ordres de l’Exécutif dont le chef politique est par ailleurs président du Conseil supérieur de la magistrature, organe qui détermine la carrière de tous les magistrats du pays.
La Haute Cour de justice, institution pourtant inscrite dans la Constitution de 1996, aurait pu permettre l’audition du très probable principal responsable de ce détournement ainsi que celles des ministres incriminés qui, faut-il le rappeler avec force, étaient en fonction à l’époque des faits. Ce scandale ainsi que bien d’autres constituent certainement une des innombrables causes de la non-création de cette haute institution judiciaire.
Quoi qu’il en soit, le peuple camerounais ne se laissera pas divertir par cette affaire mafieuse. Quand après 30 ans de règne d’un régime autocratique, quand on en vient à mettre autant de ministres, de SG de la présidence de la République et de directeurs généraux, soit l’équivalent de tout un gouvernement, le problème n’est plus ceux qui ont été nommés, mais celui qui nomme. Tous ceux qui ont mis ou continuent de mettre leurs génies et leurs énergies au service de celui qui incarne depuis 29 ans la monstruosité des forces conservatrices au sommet de l’État, devraient par conséquent méditer sur ce qui s’est passé lundi dernier. Ils ont intérêt à rejoindre urgemment les forces patriotiques et de progrès qui ont engagé un front irréversible pour un Cameroun meilleur. Seule la mise sur pied d’un processus électoral crédible, véritable vecteur d’une justice républicaine et principal levier de l’obligation de rendre compte, permettra d’éviter les abus, les règlements de compte et les tyrannies de toutes sortes qui s’amplifient toujours en fin de règne.
Joshua Osih
2ème vice-président national du Sdf