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Prisons camerounaises : des univers de non-droit - Page 54

Prisons camerounaises : des univers de non-droit - Page 54

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Index de l'article
Prisons camerounaises : des univers de non-droit
Il a un métier dans la tête: la prison transforme la vie du voleur
Prison centrale de Yaoundé : deux médecins et neuf infirmiers pour 4600 détenus
Prison d’Edéa : des détenus apprennent à élever des porcs
Dérives de la garde à vue : en caleçon, dans des cachots infects
Mal nourris par la prison : les séropositifs abandonnent leur traitement
Pour l’empêcher de se suicider, Elle vit enchaînée à la prison d’Edéa
Prison de Mbouda: l’État investit pour adoucir le sort des détenus
À Bafang et Bangangté, les régisseurs agissent
Prison principale d’Edéa: petits métiers, petits sous et réinsertion
Dangers de la promiscuité carcérale: hommes, femmes, mineurs dans le même quartier
Depuis les émeutes de 2008: Pierre Essobo Andjama croupit en prison
Après des années de prison: ces détenus attendent le verdict du tribunal
Prison de New Bell: Les femmes logées à bonne enseigne
Plus de 80 mois derrière les barreaux
Copies de jugements égarées: Il a déjà fait neuf ans de prison en trop
Garde à vue abusiveà Bafoussam: Huit jours de calvaire dans une cellule puante
Faute de soins et menotté, un suspect meurt dans une gendarmerie de Douala
Pas facile d’être graciés par le président
Des détenus de Yabassi vivent de la corvée
En prison selon l'humeur du préfet
En prison selon l'humeur du préfet
Des gardiens de prison participent à des trafics
Un commerçant armé, abattu par la police
Cellules sans toilettes à Douala : des nids à maladies pour les gardés à vue.
Plus de trois ans en prison sans jugement
Ils distribuaient des tracts politiques : Dix sept jeunes arrêtés et torturés à Douala
Accusé de tortures : un commissaire de police devant le tribunal
Accusé de tortures : un commissaire de police devant le tribunal
Détention provisoire abusive: Il passe 21 mois en prison sans être jugé
Droit de vote: des détenus
Prison de New-Bell : des détenus victimes des pratiques sexuelles non consenties
A la prison de New Bell : Des parloirs pour riches et des
A la prison de Yabassi: adultes et mineurs logés à la même enseigne
Prison de Kondengui :
Interpellation abusive: Il paye 360 000 Fcfa pour être libéré
Des militaires abattent un jeune homme à Nkongsamba
Le trafic d’armes dans les prisons camerounaises
Douala: Hommes, femmes, enfants, entassés dans les mêmes cellules
La mort rôde dans les prisons camerounaises
Un prisonnier enchaîné se pend dans sa cellule
Mort suspecte du chef de Batcham en 2007
A l'’expiration du mandat de détention provisoire
Les droits des suspects souvent bafoués
Ces prisons où la cellule est un privilège
Me Emmanuel Pensy: Les prisons camerounaises sont des écoles de crime
Prison de Mbanga : Pauvre ration pour les pauvres
Interpellation illégale : Une victime d'arrestation abusive raconte son cauchemar
Prison de New Bell : Une visite qui peut coûter cher
Univers carcéral : les prix flambent à la prison centrale de Yaoundé
Atteinte aux droits humains : Un réfugié gardé à vue pendant sept jours à Yaoundé
Menaces sur la libération de Michel Thierry Atangana en 2012
Rapports sur le Cameroun: La vie des détenus menacée dans les prisons camerounaises
Garde à vue: des prostituées victimes de rackets policiers
Réinsertion: Jean T., ancien détenu, reprend ses études
Conditions de détention : Prisons surpeuplées et vétustes
Me Jacques Mbuny témoigne
Toutes les pages
Garde à vue: des prostituées victimes de rackets policiers Dans le centre ville de Yaoundé, la capitale du Cameroun, des jeunes filles vendent leur chair contre des espèces sonnantes et trébuchantes, et se font racketter par des policiers. Un couloir sombre de l’arrière de la station services du lieu-dit Sho à Yaoundé : trois agents de police n'en finissent pas d'y recommencer leur commerce avec trois jeunes femmes.
Dans cet espace d’une vingtaine de m2, les protagonistes parlent à mi-voix. Subitement le ton monte : "Vous ne pouvez pas vous servir de moi à ce point. Notre marché était clair, je me livre, et vous me laissez partir pour poursuivre mon job. Maintenant que vous vous êtes nourri de mon corps, vous exigez de l’argent", tempête Bernadette, une jeune belle de nuit bien connue dans le milieu. La jeune femme qui exhibe et met en valeur sa féminité par des vêtements moulants, est hors d’elle. Ses yeux exorbités semblent lancer des flammes. "Je ne me laisserai pas faire. Vous ne me prendrez aucun sou", tranche-t-elle, catégorique.
Non loin de là, longiligne et provocatrice dans un pantalon noir moulant à taille basse, Adrienne se plaint aussi de "la voracité des agents des forces de l’ordre".
Elle explique au reporter que les policiers exigent d'elles de racheter leur liberté contre trois ou cinq mille Fcfa. La prostitution étant pénalement réprimée au Cameroun, des dizaines de filles de joie sont interpellées, chaque soir, aux abords du commissariat central n°1 de Yaoundé. Au cours de la seule soirée du 26 avril dernier, l’on a comptabilisé une quinzaine d'interpellations dans ce coin de la capitale camerounaise. Dix jeunes femmes ont été interpellées simultanément sur la place Repiquet à Yaoundé. Cependant que cinq autres étaient poussées dans une voiture de police, place de l’Hôtel de ville avant d'être placées en garde à vue.

"Pas la proie des hommes"

"Il n’est pas juste de nous placer en garde à vue. Ces policiers veulent à la fois aller avec nous, et nous extorquer de l’argent. Voilà qui complique tout. Nous ne nous retrouvons pas ici pour être la proie des hommes. Mais parce que la société nous réserve entre autre chose, cet espace. Il n’est pas question qu’on se laisse voler notre chair et notre argent", fulmine Michèle. "Les jeunes femmes interpellées depuis trois jours courent le risque d’être placées sous contrôle judiciaire", précise un officier de police, sous couvert d'anonymat. Le cadre de police refuse de donner des informations sur le sort de la quinzaine de jeunes femmes embarquées. Il se contente d’énoncer les articles de loi concernant la prostitution.

Un commissaire de police en service à Yaoundé précise : "Bien que la prostitution soit pénalement réprimée, aucune instruction de mes services n’autorise mes collaborateurs à interpeller les jeunes femmes qui aguichent les hommes au niveau de l’Hôtel de ville et de la place Repiquet".
Les policiers mis en cause par les filles se défendent, quant à eux, de toute arnaque. "La loi réprime la prostitution qui génère l’insécurité dans le centre ville de la capitale camerounaise. C'est pourquoi nous avons pris le parti de mettre en garde à vue ces jeunes dames surprises dans des tenues indécentes sur les trottoirs", nous a expliqué Jérôme Mbouss, l’un des policiers mis en cause.
Quand on lui demande s'il a pris de l’argent aux jeunes femmes, M. Mbouss le reconnaît, avec réticence. Le commissaire, lui, a "promis" la mise à la corvée des policiers mis en cause.
Léger Ntiga (Jade)

Me Joseph Désiré Ndjah : "Cette répression est inacceptable"
Comment la loi camerounaise réprime-t-elle la prostitution?
La prostitution est une infraction pénale prévue et réprimée par le code pénal en son article 343 qui prévoit "un emprisonnement de six mois à cinq ans et une amende de 20 000 à 500 000 pour toute personne de l'un ou l'autre sexe qui se livre habituellement, moyennant rémunération, à des actes sexuels avec autrui. Mêmes peines pour celui qui, en vue de la prostitution ou de la débauche, procède publiquement par des gestes, paroles, écrits ou par tous autres moyens, au racolage de personnes de l'un ou l'autre sexe". Il s'agit donc d'une infraction sévèrement réprimée par les lois de la République

Que dire des agents de police qui arnaquent les filles de joie à Yaoundé en consommant leur chair et en leur extorquant de l'argent?
Rien ne peut justifier ce comportement des policiers. Que ces filles soient interpellées parce qu'elles se livrent à une activité interdite par la loi est tout à fait normal. Encore faut-il prouver qu'elles le font habituellement, comme la loi l'exige. Mais procéder, comme vous l'indiquez, est totalement inacceptable et répréhensible et expose les policiers à des poursuites judiciaires.

Quels sont les droits reconnus aux prostituées?
Ecoutez, je ne crois pas qu'il y ait des droits particuliers réservés aux prostituées. Il en serait sans doute ainsi si leur profession était légalement encadrée. Or, en l'état actuel de notre législation, la prostitution est interdite. C'est un peu comme si vous me demandiez si les homosexuels avaient des droits particuliers. Donc une prostituée ne jouit que des droits qui sont reconnus à tout citoyen.

Le fait que leur métier ne soit pas légalisé au Cameroun, les met-il à la merci des clients? Bien sûr! La prostitution en elle-même les expose gravement à toutes les dérives observables dans nos sociétés: abus de tous genres, meurtres et que sais je encore! Propos recueillis par Léger Ntiga (Jade)