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Communauté internationale: Entre diplomatie et stratégie à géométrie variable - Quelle place et quel rôle pour l'Onu au sein de la communauté internationale?

Communauté internationale: Entre diplomatie et stratégie à géométrie variable - Quelle place et quel rôle pour l'Onu au sein de la communauté internationale?

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Index de l'article
Communauté internationale: Entre diplomatie et stratégie à géométrie variable
Entre diplomatie et stratégie à géométrie variable
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Quelle place et quel rôle pour l'Onu au sein de la communauté internationale?
La Communauté internationale, comme s’interrogea naguère le Maréchal Foch lors des travaux préparatoires de la Conférence de Versailles au lendemain de la première guerre mondiale, on peut se demander : « et d’abord de quoi s’agit-il ? »
Expression assez générique à laquelle on n’a pu jusqu’ici accoler une définition claire et précise, la Communauté internationale est généralement confondue avec des Organisations et Institutions internationales voire, avec des Organismes intergouvernementaux ou non gouvernementaux.

La Communauté internationale est une entité juridique basée sur des Accords internationaux. Elle est constituée d’États souverains et gouvernée par deux principes directeurs somme toute contradictoires : le devoir ou l’obligation d’assistance et l’obligation de non intervention ou de non-ingérence dans les affaires internes à un État. Le premier principe  exige la mobilisation de tous les États, au nom de l’humanité, pour apporter aide, secours et protection aux populations en cas d’oppression interne ou externe dont la population d’ un État serait victime ; ainsi que dans des situations de catastrophe ou de cataclysme naturels. Le second principe quant à lui, ambitionne de protéger et d’affirmer la souveraineté des États aux tissus social, économique, politique, militaire, technologique et diplomatique encore embryonnaires, voire très fragiles, face aux appétits de puissance et les velléités hégémoniques des États les plus « avancés » ou « puissants ».

L’antagonisme de ces deux principes semble justifié les hésitations à intervenir voire, quelques très controversées  actions de la Communauté internationale face à certaines situations et autres fléaux que connaissent nombre d’États ; notamment en Asie, au moyen et proche orient, en Amérique latine et encore avec plus d’acuité en Afrique au sud du Sahara. Au rang de ces situations et fléaux, nous pouvons mentionner: la pauvreté, les catastrophes naturelles, la corruption, les attentats terroristes, les violations massives des droits humains ; à cela il faut ajouter les mouvements rebelles, la criminalité transfrontalière, la prévarication des derniers publics, les prises d’otages et la crise de la démocratie (révisions constitutionnelles à l’emporte-pièce, patrimonialisation et monarchisation du pouvoir, difficile alternance au pouvoir, fraudes électorales, difficile acceptation de la sanction des urnes…) qui viennent assombrir d’avantage l’univers africains.

La volonté de puissance et le besoin de satisfaction des intérêts égoïstes ont toujours été au cœur des relations tant bilatérales que multilatérales entre les États ; d’où la prégnance des élans conflictogènes et belligènes entre eux. Et c’est pour préserver l’humanité des affres de ces situations que la Communauté internationale, après l’échec de la Société des Nations (SDN) à empêcher au monde de connaître une seconde fois les horreurs de la guerre, avait créé l’ONU en 1945 pour encadrer et réguler les relations entre États tout en lui assignant trois buts principaux : garantir la paix et la sécurité internationales,  préserver la liberté et l’égalité souveraine des États et assurer leur développement harmonieux.

Même l’avènement de l’ONU n’avait pas pu contenir les élans hégémoniques des États et l’on assista à la division du monde en deux blocs idéologiquement opposés.

La chute du mur de Berlin en 1989, synonyme de la fin de la guerre froide ou de l’antagonisme Est-ouest avec l’unipolarisation du monde qui s’en s’était suivi, avait laissé penser à l’avènement d’un monde plus juste et plus égalitaire ; mais loin s’en faut. Avec l’émergence de nouveaux acteurs non étatiques, la Communauté internationale a connu alors plusieurs mutations et transformations ; elle est aujourd’hui confrontée à des défis humanitaire, écologique et sécuritaire ; elle est en quête de stabilité et est émaillée par le paradoxe de la clôture et de la décentralisation.

Face à toutes ces considérations, on est fondé à s’interroger sur la place et le rôle de l’Organisation des Nations Unies (ONU) au sein de la Communauté internationale. En effet, au regard des défis et mutations de la société internationale, l’ONU peut-elle encore être appréhendée comme l’institution far de la Communauté internationale en matière de préservation et de garantie de l’idéal de paix et de sécurité, de liberté et d’égalité souveraine des États ainsi que de développement de tous et de chaque État ? Est-elle encore le véritable « gendarme » du monde en mouvance continue ? est-elle une Organisation intergouvernementale neutre ou constitue-t-elle simplement un instrument sous le couvert duquel certaines grandes puissances maîtrisent l’agenda international et imposent leur volonté aux autres membres de la Communauté des nations ? n’est-il pas nécessaire aujourd’hui, dans une perspective de redynamisation et de revitalisation, de redéfinir les missions assignée à l’ ONU par la Charte de San Francisco du 26 juin 1945?

Toutes ces questions témoignent en fait de la difficulté que l’on a à mieux situer l’ONU au milieu de la constellation ou du réseau assez étendu des Organisations à caractère universel ou régional qui émaillent la Communauté internationale et qui concourent toutes, directement ou indirectement, à la réalisation de la paix et de la sécurité, de la liberté et de l’égalité ainsi que du développement des États. Dans cette perspective, la place véritable de l’ONU est intimement liée voire, conditionnée par son rôle non seulement tel que défini par la Charte de San Francisco, mais aussi et surtout tel qu’elle s’accomplie effectivement des prescriptions de cette Charte.      
Il ne fait l’ombre d’aucun doute, la Communauté internationale en créant l’ONU au lendemain de la seconde guerre mondiale, ambitionnait de se doter d’une Institution forte, transcendant les États et capable de la conduire vers une destinée épanouie.
Ainsi, aux termes du préambule et de l’article 1er de la Charte des Nations Unies, les buts que poursuit l’ONU se résument au triptyque paix, liberté et développement ; même comme la paix apparaît comme « le but des buts ». La Charte définit également les principes (art 2) qui doivent conditionner les actions des membres dans la poursuite de ses buts ; elle a également doté l’ONU d’un ensemble d’Organes principaux et subsidiaires (art 7) devant poursuivre ces buts tout en donnant la responsabilité principale en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, qui conditionne inéluctablement la réalisation d’autres buts, au Conseil de sécurité (art 24).  

Sur ces fondements, l’ONU a eu à mener des actions que nous pouvons globaliser en trois catégories : les actions juridictionnelles, diplomatiques et militaires.

Dans le cadre des actions juridictionnelles, l’ONU a eu à régler par le canal de la Cour internationale de justice (CIJ), son organe judiciaire principal, plusieurs conflits de droits opposant les États, tout en les apportant des solutions définitives. L’action de la CIJ dans le règlement des différends s’avère être dans l’ensemble très efficace, en considération du faible taux de contestation de ses Arrêts par les États parties à un différend ; ces États se fondent même parfois sur ces Arrêts pour se prévaloir de la légalité ou de la légitimité de certaines de leurs actions.

Relativement aux actions diplomatique, l’ONU se fonde généralement sur le chapitre VI de la Charte pour mener des opérations de médiation, de conciliation ou des bons offices pour mettre un terme à des conflits de nature politique qui opposent deux États entre eux, ou les ressortissants d’un même État (tel est le cas en ce qui concerne les conflits politiques africains).

En ce qui concerne les actions à caractère militaire, elles sont appréciables au travers plusieurs opérations ou missions de maintien de la paix que l’ONU organise et coordonne à travers le monde par l’envoi des soldats de la paix (les casques bleus) dont la principale mission consiste à s’interposer entre les belligérants inter ou intra étatiques afin de leur permettre d’aller à la table de la négociation. On peut d’ailleurs en citer plusieurs exemples de conflits intra étatiques où on observe la forte présence des soldats de la paix : le Soudan, la RCA, la Côte d’Ivoire, la RDC, la Somalie, l’Irak, la Bosnie…

Aussi, dans des situations d’extrême détresse et lorsque les mesures de police entreprises par le Conseil de sécurité n’ont pas produit des résultats satisfaisants, l’Onu, agissant en vertu du chapitre VII de sa Charte constitutive, est portée à prendre des mesures coercitives à caractère politique et économique à l’encontre des gouvernements ou singulièrement à l’encontre de certains gouvernants indélicats ; elle est même souvent amenée à constituer des Commissions d’enquête pour établir des responsabilités tant individuelles que collectives (cas de la Yougoslavie en 1992, du Rwanda en 1994, du Burundi en 1995…).

La paix est la sécurité internationales tant souhaitées et rêvées connaissent aujourd’hui des coups de boutoir en raison d’un ensemble de traits caractéristiques de la Communauté internationale. L’ONU n’a pas pu se constituer depuis sa création comme on pouvait le penser, ni en législateur suprême de la Communauté internationale, ni en une Autorité supranationale, ni en un véritable gendarme universel devant garantir l’application du droit international et sanctionner sa violation au besoin par la contrainte ; elle n’a pas non plus pu constituer une Juridiction absolument obligatoire, car la justice internationale repose sur le consensualisme, ni préserver l’égalité souveraine des États , ni endiguer la tension permanente entre l’unilatéralisme et le multilatéralisme ou entre l’universalisme et le régionalisme.

Les tensions qui traversent la collectivité des Nations aujourd’hui se manifestent sur le terrain économique, politique, idéologique, écologique, militaire et culturel ; auxquelles il faut ajouter la fracture nord-sud ou entre les pays développés et ceux sous-développés, en voie de développement, voire pauvres et très endettés.

Pour toutes ces raisons et face à toutes ces tensions, qui somme toute témoignent de l’échec ou  de l’incapacité avérée de l’ONU de pouvoir surveiller seul la vaste communauté des États, l’on a assisté à un babélisme des regroupements régionaux (UE, UA, OEA…) ou sous régionaux (OTASE, SADC, CEMAC, UEMOA, CDEAO…) voire, l’adoption des pactes de défense inter étatique (OTAN, le Pacte d’assistance mutuelle de la CEEAC) qui offrent aux États parties les solutions identiques à celles de l’ONU et parfois plus adaptées à leurs spécificités (même si la Charte des nations unies soumet l’effectivité de certaines actions militaires à l’accord préalable du Conseil de sécurité ; point n’est plus de préciser que cette exigence est souvent bafouer comme en témoigne l’intervention de la coalition occidentale, conduite par les États-Unis sous le couvert de l’OTAN en Irak depuis 2003). Pour bon nombre d’États en fait, l’ONU est aujourd’hui plus une tribune ou un instrument aux mains des grandes puissances pour soumettre encore plus d’avantage les autres États à leur seule volonté ; en témoigne le mode d’adoption des résolutions du Conseil de sécurité qui nécessite absolument l’aval des 5 membres permanents.

L’Onu n’a pas encore pu jusqu’à nos jours instaurer à travers ses actions un véritable ordre public international faisant une grande place à la justice, l’équité et la solidarité. Elle lésine encore à prendre en considération tous les facteurs stabilisateurs et déstabilisateurs ; les forces individualistes et les tendances solidaristes ; les vecteurs de fusion et d’union ou d’intégration. L’ONU tarde à construire les liens de coopération mutuellement bénéfiques pour tous. Il est en effet avéré que les appétits de puissance, les velléités hégémoniques et la volonté des États de vider leurs différends par la violence ne disparaissent pas par la seule vertu des normes juridiques contenues dans la Charte de San Francisco et d’autres Textes connexes sur lesquels l’Onu fonde ses actions ; dans cette logique, l’Onu ne parvient pas à définir un standard minimum de règles de jeu parallèles ou alternatives à partir desquelles les relations internationales vont être menées. Aussi, la logique des solutions consensuelles que l’ONU a adopté  ne permet pas d’aboutir à une solution durable concernant les problèmes d’intérêt commun, qui ne sont tel que lorsqu’ils intéressent en premier chef les 5 (États-Unis ; France ; Chine ; Grande Bretagne ; Russie).

La paix et la sécurité internationales qui étaient le but des buts de l’Onu ne sont pas aujourd’hui pleinement garanties, en témoigne la non maîtrise des armements par cette dernière (les tentatives existants en la matière telles les Traités SALT I, SALT II et START de 1972, 1978 et 1991signés entre les États-Unis et la Russie sont plus des initiatives privées des États concernés). L’ONU ne parvient pas à s’adapter au nouveau visage de la paix et de la sécurité internationales qui passent par la sécurité humaine (redistribution juste et équitable des richesses et des biens) ; la sécurité politique (établissement d’un régime de liberté, d’égalité, de démocratie et de participation internationale) ; la sécurité sociétale (préserver l’identité culturelle des groupes humains) et la sécurité environnementale (exploitation durable des ressources). L’ONU dépasse très rarement ses missions traditionnelles en matière de maintien  et de consolidation de la paix ; ce n’est que timidement ou dans des cas isolés qu’elle construit cette paix (cas du Salvador où elle s’était fortement impliquée dans les réformes législatives et constitutionnelles, l’organisation des élections) ou l’impose de manière perpétuelle comme (voir l’opération « Restor hope » en Somalie).

Enfin de compte tous ces échecs de l’ONU justifient aujourd’hui sa nécessaire redynamisation ou revitalisation ; ceci doit être envisagé en terme d’adaptation à la conjoncture internationale  et d’invention de son nouveau rôle ou ses nouveaux défis qui doivent concerner : sa réforme profonde (élargissement inéluctable de son Conseil de sécurité) ; le désarmement et la lutte contre les Armes légères portatives de petit calibre (ALPPC) ; la lutte contre le trafic des drogues et autres substances psychotropes ; le terrorisme ; la réduction du clivage nord-sud en terme de développement humain et technologique ; la préservation du climat ; le développement durable ; l’avenir du genre humain ( interdire le développement des recherches sur le clonage humain) réguler l’immigration internationale et restaurer ou consolider la démocratie plus particulièrement en Afrique au sud du Sahara. Tout ceci n’étant possible qu’à travers sa franche collaboration, (plutôt que son envie de les supplanter)  avec les Organisations régionales qui la concurrencient énergiquement  dans la tentative de résolution des problèmes internationaux. L’ONU ne pourra en définitive retrouver sa place d’Institution internationale far et digne représentant de la société internationale  que du jour où elle se libérera de son embrigadement par les 5 membres permanents de son Conseil de sécurité dont le droit de veto qu’ils bénéficient renferme les germes de son propre sabordage.

Tchuisseu Njouemen Rocher de Dieu

Doctorant en Droit public à l’Université de Yaoundé II