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Cameroun : la diaspora, l’une des clés de notre développement

Cameroun : la diaspora, l’une des clés de notre développement

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Malgré d’immenses potentialités, son relatif endettement et sa stabilité, le Cameroun a d’énormes difficultés à trouver les financements pour financer ses projets de développement et son économie.
En effet, après plusieurs décennies d’errance et de manque de vision, on peut affirmer que notre a pris beaucoup de retard par rapport à d’autre pays de même structure économique.
En outre, dans un contexte de globalisation et de crise financière mondiale généralisée, les petites stratégies de lutte pour le maintien au pouvoir ne peuvent prendre le dessus sur l’intérêt général et l’avenir des Camerounais et du Cameroun.
De ce fait, dans la conception et la mise en œuvre de nos programmes de développement, plusieurs variables doivent nécessairement nous inspirer. Pour rebâtir l’Afrique, bien au-delà de l’exploitation minière, agricole, forestière, halieutique et énergétique, il y a en outre l’histoire. Notre histoire qui nous interroge et nous poursuit et qui de plus est, doit également nous inspirer.  Et c’est à juste titre que l’on dit, « pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient ». En effet, s’il doit incontestablement, dans nos processus de conception et d’élaboration des politiques, être légitimement question des structures organisationnelles et structurantes de nos économies, que ce soit du secteur secondaire ou de l’industrie lourde, il y a tout aussi légitimement une autre donnée essentielle que nous devrons forcément intégrer dans notre démarche, la promotion et la réalisation de l’intégration de toutes les composantes de l’homme Africain, où qu’il soit et quoiqu’il soit devenu. En effet, le développement du continent ne sera l’expression accomplie d’une dynamique économique efficiente, que si elle est basée comme dit précédemment, sur l’interaction de nombreuses variables dont le but essentiel est de satisfaire de manière durable, d’une part, l’offre des biens et services et, d’autre part, de réaliser la quête et l’unité historique de notre identité, telle qu’elle s’exprime dans et hors du continent, afin de parvenir à son accomplissement idiosyncratique. Toutes choses qui commandent que nous fassions preuve notamment d’audace, de pragmatisme, de créativité, de vision et de mémoire. Tout ce qui précède n’est en rien antinomique à la croissance, économique, au PIB et au besoin de naissance d’une classe moyenne. En effet, les prévisionnistes laissent entendre que : « à l’horizon 2015, le nombre de ménages disposant de revenus supérieurs à 3 000 dollars par an devrait atteindre les 100 millions, ce qui placerait le continent à égalité avec l’Inde. Et, dans la même veine, la Banque africaine de développement prédit, dans une récente étude sur l’Afrique dans cinquante ans, que “la plupart des pays africains auront accédé au statut de pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, et les formes extrêmes de la pauvreté auront été éliminées”.
Dans le contexte de compétition internationale et de concurrences tous azimuts qui prévaut, il est impératif que nous mettions en exergue nos propres atouts. Au nombre de ceux-ci, il y a l’apport de la diaspora dont le dynamisme, les moyens financiers et le savoir-faire doivent être structurellement sollicités. Des pays comme l’Inde, la Chine, le Japon ont compris combien la mise à contribution de leurs diasporas pouvait être déterminante dans la course pour la maîtrise des outils nécessaires à leur développement. Plus près de nous, les pays africains d’expression anglaise, l’ont à leur tour compris. En effet, c’est de plus en plus qu’un certain nombre d’entre eux intègrent dans leur politique de développement, le paradigme diasporique. Un paramètre incluant non seulement leurs diasporas expatriées, mais également, la donne de la diaspora d’origine africaine installée aux Amériques et dans la Caraïbe.

Les avantages d’une telle démarche en matière d’éducation, de formation, de santé, d’étude et d’ingénierie
Pour les énormes besoins de nos économies et leur développement, de la même façon que nous demandons à nos partenaires un transfert de technologie, il nous faut envisager sérieusement et méthodiquement un transfert des savoir-faire de nos diasporas. Ceci ne doit pas être pris comme une simple vue de l’esprit car, il y a des pays comme le Viet-Nam, qui le font déjà.  Ce pays en effet, fait pratiquement pourrait-on dire, la chasse à tous ses ressortissants installés à l’ étrangers, qu’ils soient de la première, de la deuxième et/ou même de la troisième génération, manifestant le désir de retourner dans leur pays d’origine ou dans le pays d’origine de leurs parents. Le Viet-Nam, dans cette perspective leur offre notamment des facilités et avantages pour susciter, stimuler et encourager leur retour. Concrètement, son gouvernement à mis en place au sein du ministère des Affaires étrangères, un département qui s’occupe spécialement de tous les aspects de cette problématique.
Ce transfert de savoir-faire doit également être considéré comme un soutient réel au secteur public dans l’éducation, l’enseignement et la formation car, les compatriotes de la diaspora, que ce soient les africains expatriés ou ceux dont les parents ont été transportés aux Amériques et la Caraïbe pendant le commerce triangulaire, sortent pour un grand nombre d’entre eux, des meilleures universités et autres grandes écoles des pays occidentaux et sont ainsi presque naturellement déjà formés à l’ouverture au monde, à l’entreprise, aux affaires et plus généralement à tout ce qui concoure au processus de développement économique. Un important apport que l’on pourrait inscrire dans une logique de co-développement et de coopération ultra-marine à composante d’origine africaine hautement qualifiée.
Ce qui est valable pour l’économie l’est également dans d’autres secteurs et notamment dans le domaine de la santé. C’est en effet, tous les jours que l’on nous conte les success story de ces médecins d’origine africaine qui font des miracles dans leurs domaines d’intervention en Europe et aux Amériques. Bon nombre d’entre ne demandent pas mieux que de mettre ce savoir à la disposition des populations africaines vivant sur le continent. L’on peut supposer que s’il y avait eu une politique volontariste dans le domaine de la santé, on aurait pu non seulement éviter la fermeture de La polyclinique sainte Anne, la clinique du Bon Secours du professeur René Essomba, à Yaoundé, et de la Clinique Soppo Priso à Douala, mais également promouvoir une sorte de joint-venture/coopération entre nos médecins formés sur le continent et ceux exerçant hors du continent. En effet, dans ce domaine bien précis, nos praticiens exerçant dans les meilleures formations hospitalières étrangères, peuvent également apporter une réflexion intégrée, parce que venant de gens connaissant l’Afrique et les réalités locales, tant sur le plan de l’idée, de la conception que nos pays veulent avoir de la médecine et de la santé, que sur les évolutions de celle-ci instantanément et à moindre coût car, cette diaspora regorge de professionnels de la santé aux capacités professionnelles et managériales qui ne souffrent d’aucun doute et qui ont fait leur preuve dans les pays occidentaux ou la demande est d’un haut niveau d’exigence.
Il n’est plus un secret pour personne que là où passe la route, le développement suit. Ce simple adage à lui seul peut donc expliquer mieux que tous les discours du monde, les colossaux besoins du continent africain en infrastructures de base que ce soit en matière d’habitat et de logement, des routes, des ports, des aéroports, des ponts, des tunnels, et tutti quanti, de travaux publics. Chaque projet nécessite des études d’ingénierie au préalable. Les bureaux et sociétés d’études, et conseils établis au à l’étranger regorgent eux aussi de membres de notre diaspora. Prêts à soutenir et à conseiller en amont, la conception et la réalisation de ces projets. Comme dans tout ce qui précède en matière d’éducation, de formation et de santé, le problème est surtout, le manque d’une volonté politique de trouver les voies et moyens de faire appel à cette expertise.

Pêle-mêle, quelques exemples des membres de la diaspora qui excellent à l’étranger
« Avec 10 000 entrées par an, les Afro-Américains forment la plus importante colonie de touristes au Ghana. Plus d'un millier d'entre eux ont choisi de s'installer dans ce pays d'Afrique de l'Ouest de 20 millions d'habitants, coincé entre la Côte d'Ivoire et le Togo. Ancienne colonie britannique, le Ghana est le pays d'Afrique le plus visité par les Noirs américains, devant l'Afrique du Sud et le Kenya.  
La culture ghanéenne, qui a su préserver ses traditions, attire surtout pour son authenticité , commente Victoria Cooper, consultante installée en Afrique depuis plus de vingt ans, présidente de l'Association des Afro-Américains du Ghana.
Avec ses anciens forts parsemés le long de la côte, le Ghana offre surtout un retour aux sources chargé d'émotions aux descendants des esclaves noirs. Construits entre les XVe et XVIIIe siècles, ces édifices témoignent de l'ampleur prise par le commerce du " bois d'ébène ". Trois de ces châteaux, Saint Jago, Cape Coast et Elmina, ont été inscrits par l'Unesco au patrimoine mondial de l'humanité. " Au même titre que la Grande Muraille de Chine, la statue de la Liberté et la tour Eiffel ", s'empressent de souligner les brochures de promotion touristique du Ghana.
Les autorités ont tout fait pour favoriser un engouement qui n'est pas par ailleurs récent. En effet, William Edward Burghardt (" WEB ") Du Bois, l'un des plus grands penseurs noirs des Etats-Unis, a choisi de s'installer en 1962 au Ghana - alors dirigé par le président Kwamé krumah, l’un des pères du panafricanisme -, où il est mort et enterré. Lancé en 1994 par le révérend américain Leon Sullivan, un défenseur de l'avancement des Noirs, un sommet " africain/afro-américain ", organisé chaque année au Ghana, a ranimé la flamme. »
A la suite de ce long extrait d’un article paru dans Jeune Afrique, le Ghana peut être considéré comme l’un des pays africains qui ont le mieux compris combien la diaspora pouvait contribuer légitimement dans le processus de son développement. Légitimement parce que, somme toute, historiquement parlant, le devenir du Ghana doit être l’affaire de tous les Ghanéens sans exclusive. Et, il faut dire que ce pays, avec une moyenne de croissance de 10 % entre 2010 et 2012 et une stabilité politique désormais exemplaire, a de quoi attirer. C’est donc naturellement que dans la perspective d’associer tous ces ressortissants restés au pays ou étant hors de celui-ci, que ce pays est non seulement resté en étroite relation avec sa diaspora en Angleterre, au Canada, aux USA, pays d’immigration traditionnelle, pourrait-on dire, mais également dans des pays comme l’Austratie, la Nouvelle-Zeland, pays d’immigration plus récente. La majorité des Ghanéen vivant en Australie par exemple, ont un très bon niveau d’éducation car, ils ont largement profité des moyens que le pays offre à ses habitants, dans cette veine. Et c’est donc tout naturellement que l’on compte parmi ses membres des célébrités que ce soit dans les arts et spectacles, le sport, les affaires et tutti quanti. Une de ces célébirtés, Faustina Agolley, c’est particulièrement illustré dans la galaxy médiatique où elle est présentatrice, journaliste et productrice de renom de la TV. Mais cette diaspora compte bien évidemment d’autres stars qui écument d’autres domaines que le sport qui semble être le domaine de prédilection des Africains et de leur descendance. Parmi ceux qui, bien qu’ayant grandi à l’étranger et faisant partie de l’élite des pays où ils sont nés, ont décidé de prendre le chemin du retour au pays, il y a de nombreux exemples et témoignages.
Il y a l’exemple de Kissy Agyeman-Togobo, 37 ans que nous rapporte encore le Journal Jeune Afrique et qui dit  ceci :«Ici, il y a tellement de choses à faire. Tout est nouveau, à construire. » Attablée à la terrasse d’un café dans un quartier chic d’Accra, Kissy est enthousiaste. Née au Royaume-Uni, elle a grandi à Londres où elle a commencé sa carrière avant de revenir au Ghana, que ses parents avaient quitté dans les années 1960. « L’idée a germé en 2009. C’était le début de la crise en Europe et je me suis rendu compte que bon nombre d’options se présentaient, en revanche, sur le continent. » Elle décide alors de créer une société de conseil pour les entreprises étrangères souhaitant s’implanter en Afrique de l’Ouest et s’installe avec son mari, en février 2012, dans la banlieue d’Accra. Un cas de figure qui se fait de plus en plus fréquent.
Cette année, les autorités ghanéennes et les associations d’aide aux « migrants du retour » ont enregistré un record de demandes de la part de membres de la diaspora qui se renseignent pour revenir au Ghana. Le phénomène a pris une telle ampleur que les returnees, comme on les surnomme, devraient bientôt faire l’objet d’une série télévisée. Ils s’installent dans les quartiers résidentiels prisés d’Accra, intègrent les multinationales, les agences de services ou créent leur entreprise, et viennent grossir les rangs des classes moyennes et supérieures. Souvent, la décision de rentrer répond à l’amenuisement de perspectives en Europe. « Beaucoup appartiennent à l’élite et ont compris qu’ils ne pourraient jamais avoir d’aussi bons postes que chez eux », explique Afua Hirsch, correspondante en Afrique de l’Ouest pour le quotidien britannique The Guardian, et elle-même returnee. »

Le retour au pays : pas si facile
Il nous semble important de démarrer cette séquence aussi avec des cas concrets de retour car, il n’y a pas mieux que l’exemple pour prêcher efficacement et convaincre. Et comme les Camerounais ne sont pas en reste dans ce vaste mouvement qui s’amorce, voici quelques exemples concernant des immigrés originaires de ce pays d’Afrique centrale, que nous relate le site belge camer.be. «  Idriss Nguepnang a eu l’idée d’une chaîne de restaurants conciliant les exigences d'un restaurant moderne et convivial avec des éléments culturels camerounais. Le produit phare de cette entreprise n'est rien d'autre que le «beignet/haricot», produit de grande consommation que le promoteur a réussi à sortir de la rue, pour un cadre plus confortable que le tournedos.
Sur son site internet, «Tchop et yamo» (mange et régale-toi en argot camerounais), décline la philosophie de sa cuisine: «une cuisine qui s'inspire d'une recette familiale, le plat tel que fait à la maison !...les recettes sont simples mais uniques. Tout est fait avec amour, expérience, service et dévouement pour le bonheur de tous». Du beignet-haricot dans un restaurant de luxe. L'idée est banale, mais il fallait y penser.
Contre vents et marées, défiant les pronostics pessimistes d'amis qui lui prédisaient un flop retentissant, ldriss a signé son retour au pays de fort belle manière. Et la potion magique a fait des émules. Si quelques restaurants plus ou moins huppés proposaient déjà la recette, aujourd'hui, les boulangeries sont entrées dans la danse et achalandent leurs étals de «beignet-haricot». Nos mamans qui garnissent rues et ruelles de la fameuse recette culinaire sont renvoyées à leurs fourneaux pour mieux se pourvoir.
La concurrence est de mise et débouche naturellement sur une saine émulation: "Nous sommes satisfaits d'avoir pu amener ce produit culinaire à ce niveau, ça suscite de nouvelles vocations", se réjouit encore ldriss, qui se félicite aussi de l'expansion rapide de son entrez prise désormais présente dans les villes de Yaoundé et Douala, avec une centaine d'emplois créés.
L'attitude de Fred Bougna n'est pas aussi jubilatoire, mais le jeune homme revenu de Londres n'est pas moins fier de l'œuvre entreprise depuis qu'il est rentré au pays il y a une dizaine d'années. «J'ai pu diversifier l'entreprise familiale en y apportant un volet touristique. Je propose des packs touriste pour ceux qui veulent visiter le Cameroun, j'attends une délégation d'Américains dans deux mois», déclare le jeune entrepreneur.
Et même dans des domaines qui arrivent à saturation, l'inventivité est toujours possible. Rentré au Cameroun après une brillante carrière à Africa Ni et à la BBC, le journaliste Marcel Amoko a lancé Kalak FM en 2011. Dans un secteur où foisonnent tintamarre et amateurisme, Kalak (raconte en langue bassa) veut faire entendre un son différent: «la volonté d'informer, d'éduquer et de divertir, le souci de promouvoir le respect de l'éthique et de la déontologie journalistiques», anime Amoko, qui constate aussi avec désolation que «l'environnement médiatique semble avoir perdu le sens des valeurs essentielles que sont l'éthique, le respect de l'autre».
Animation décalée, information dépouillée, la nouvelle radio généraliste émettant à Yaoundé emploie une quinzaine de personnes et s'aménage progressivement un espace dans l'univers médiatique. Camerounais: «Notre cœur de cible ce sont les décideurs actuels ou en devenir, ceux qui ont la capacité d'analyser la société, d'insuffler une nouvelle façon de penser les choses, mais surtout d'agir», reconnait Amoko, qui n'est pas loin d'assumer le statut de radio élitiste qui colle à sa chaîne depuis sa création. «Mais nous restons proches des préoccupations du grand public et après deux ans, les annonceurs commencent à nous faire confiance», affirme-t-il.
 
Difficile insertion
« Tous les Camerounais qui rentrent ne se risquent pas à l'entrepreneuriat. Diplômé en gestion, Roger Kenfack a flirté avec le monde de la haute finance en France et n'a pas eu trop de peine à trouver un emploi à son retour au Cameroun: «J'ai été recruté par une banque de 16 places qui me propose un salaire conséquent. Je n'ai pas de soucis financiers, mes problèmes sont ailleurs», raconte Kenfack.
Des problèmes, bien sûr qu'il y en a. Volontariste et débordant d'énergie, ce mouvement de retour au pays natal est loin d'être un conte de fée. Il bute sur des écueils dont la récurrence pourrait en décourager plus d'un: «j'ai d'abord été repoussé par une bonne frange de cadres de la banque qui se comportaient comme si je venais leur piquer leur place», révèle Roger Kenfack. «Il y a un grand problème de mentalité, poursuit Fred. Beaucoup de Camerounais sont complaisants dans leur travail, ils ne respectent pas les exigences de délais et d'excellence, c'est gênant d'être toujours derrière des gens pour qu'ils fassent leur travail».
Tous ces jeunes entrepreneurs qui ont eu le courage de se lancer dans le monde des affaires au Cameroun regrettent aussi une législation peu incitatrice et des tracasseries administratives à répétition. Pourtant, loin de lâcher prise, ils se disent convaincus d'avoir fait le bon choix: «Il m'est arrivé de perdre le moral et de vouloir rentrer à Londres. Mais dès que j'y retourne, mon pays me manque à nouveau. J'ai compris que c'est ici que je dois être, c'est ici que je dois me battre pour améliorer les choses», insiste Fred, comme s'il voulait rallier à cette cause noble, de nombreux Camerounais qui végètent en Europe.
«J'essaye de convaincre d'autres Camerounais de faire comme moi, dit-il. Beaucoup hésitent, certains ne sont pas préparés, ça prendra du temps, mais, ce mouvement de retour va s'intensifier», pense le jeune homme. »
Pour être plus efficace et plus profitable au Cameroun, ce retour doit être encadré, et méthodiquement, devons nous ajouter. Quoique timidement, il faut cependant reconnaître que des initiatives dans ce sens voient de plus en plus le jour pour accompagner ceux des Camerounais qui désirent rentrer. Dans cette perspective, depuis 1996, le Fonds national de l'emploi (Fne), un organisme public chargé de la promotion de l’emploi sur l’ensemble du territoire camerounais et dirigé par M. Mouthe Camille, a lancé le Programme d'appui au retour des immigrés camerounais (Paric), qui vise leur insertion et leur réinsertion socioprofessionnelle, à travers une multitude de mesures d'accompagnement, tant au niveau, des pays d'accueil qu'au Cameroun.
Depuis le lancement de ce projet, 3.150 expatriés en ont bénéficié. 101 ont reçu des appuis en équipements et 432 emplois ont été pourvus. Mais ces résultats, qui sont surtout le fait de l'engagement de la coopération internationale,  et qui sont encore bien modestes, gagneraient à s’autonomiser et à s’amplifier car, nombreux sont en effet  les Camerounais aspirant au retour.
Le mouvement de retour des Camerounais est salutaire car, bien-au-delà des sérieuses perspective de réussite individuelles qu’il va nécessairement engendrer, et de l'important déclic psychologique qu’il pourrait induire, il recouvre une importante dimension historique qui permettra notamment au Cameroun de marché sur toutes ses jambes car, ce pays, en possède indiscutablement plusieurs et a besoin de toutes, à l’instar de ces animaux et insectes dont plusieurs pattes assurent la stabilité.

En conclusion, la question des africains à nationalités multiples
Lors d'une visite officielle aux Etats-Unis, en 1999, le président ghanéen, Jerry Rawlings, a été jusqu'à promettre la double nationalité aux immigrants américains. L'annonce, qui ne s'est pas concrétisée, a néanmoins attiré une nouvelle vague de candidats au départ. John Kufuor, le successeur de Jerry Rawlings, a évoqué en 2001 une loi permettant à tout membre de la diaspora noire de résider et de travailler " sans restriction " au Ghana. Ce geste a été fêté outre-Atlantique, par les défenseurs d'un " droit au retour " en Afrique.
Le volontarisme politique des dirigeants ghanéens a aussitôt porté des fruits. De nombreux membres de l’importante communauté afro-américaine des USA, ont amorcé le chemin du retour. Avec une incidence collatérale comme nous allons le voir. Parmi les returnees afro-américains figurent, des universitaires, des retraités, des infirmières, quelques rastas et des hommes d'affaires. Regimanuel Gray, l'un d'entre eux, a particulièrement bien réussi dans l'immobilier. Créée en 1991, la société qui porte son nom emploie 220 personnes à la construction de lotissements à Accra et Tema. La clientèle est en partie américaine, mais surtout ghanéenne. Car le Ghana ne fait pas rêver seulement à Detroit ou Chicago. Sur les 3 millions de Ghanéens installés aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Italie, beaucoup reviennent au pays natal pour passer les vacances et investir dans la pierre.
En 1990, en route pour Trinidad et Tobago, une jamaïcaine me posait déjà la question de savoir si les Africains avait oublié qu’ils avaient une partie d’eux-mêmes dans cette partie du monde. En effet, à cette époque, comme pour lui donner raison, il n’y avait à Port-of-Spain, la capitale de Trinidad et Tobago, qu’une ambassade du Nigeria  et un consulat du Sénégal. Et les seuls raisons économiques ne pouvaient profondément l’expliquer. La vérité étant plutôt à mi-chemin entre le fait que d’une part, les dirigeants des Etats africains au sud du Sahara, ne percevaient pas véritablement l’intérêt d’une politique de rapprochement et d’intégration de la diaspora africaine des Amériques et de la Caraïbe, et d’autres part, qu’ à cause de ce manque de vision, il n’y avait pas lieu d’attendre d’eux l’expression d’une réelle volonté politique dont la multiplication des représentations diplomatiques n’aurait été que la partie visible l’iceberg.
Les choses ont heureusement beaucoup changé depuis. On pourrait même dire que l’entrée en scène de Barack Obama et son voyage médiatisé, en 2006, dans son village ancestral au Kenya,  on assiste, comme qui dirait, à un réveil de patriotisme chez les afro-américains en général et même dans l’ensemble de la diaspora africaine. L’Afrique pour ces millions d’hommes et de femmes, a cessé de n’être qu’une sorte d’image d’Epinal qui avait été instillée dans bien des têtes et notamment aux Antilles françaises.
En effet, un changement positif s’est opéré, est reconnu et cité comme tel par de nombreux médias internationaux. Exemple, le quotidien Los Angeles Times, qui cite l’acteur africain-américain Isaiah Washington, 45 ans, qui raconte que pour lui l’Afrique n’était qu’un continent « d’indigènes en pagne avec un os dans le nez ». Mais, aujourd’hui, le voilà chef de village en Sierra Leone, à la tête d’une fondation qui construit une école dans le pays, restaure un hôpital… Et le voilà surtout citoyen. Après un test ADN en 2005, il a découvert son appartenance au peuple mende, vivant en Sierra Leone, et n’a eu aucun mal à obtenir la nationalité qu’il a demandée au président Ernest Bai Koroma. En débarquant à Freetown, il avait eu le sentiment d’avoir retrouvé sa « vraie famille ». Les autorités n’ont pas hésité : quoi de mieux qu’une star de cinéma pour redorer le blason du pays après dix années de guerre civile ?
 Question avons-nous historiquement, voire même moralement le droit de priver à la descendance africaine, qu’elle soit des Amériques, de la Caraïbe ou même simplement née de parents africains installés pour quelque raison que ce soit, dans les pays occidentaux, la possibilité, de retourner vivre pleinement en Afrique, leur continent d’origine ? La réponse est non. Et ceci, sans avoir à leur poser une quelconque condition. Et surtout pas la renonciation ou la perte de leur nationalité du moment.
Conscient de la manne financière que représente la diaspora outre-Atlantique, le Ghana accorde lui aussi la nationalité aux Afro-Américains. Mais tous ne sont pas, comme Isaiah Washington, bouleversés par ce retour aux sources : en 2007, la Guinée-Bissau avait invité Whoopi Goldberg, qui venait de découvrir ses racines papels et bayotes, deux tribus du pays. Attendue comme une star nationale, l’actrice n’a jamais fait le déplacement. Pourquoi ? Certainement à cause de la mauvaise image que renvoie ce pays désormais sous la coupe des barons de la drogue et ou se succèdent, coups d’Etat et assassinats de dirigeants civils et militaires.
La première vague des Africains Américains qui est s’installent dans les pays africains, que ce soit au Ghana, en Sierra-Leone, en Gambie, en Côte d’Ivoire, au Liberia ou au Sénégal, est regardée à la loupe par de nombreux autres citoyens Américains qui manifestent de plus en plus le désir de retourner sur les origines de leurs premiers parents. Ce retour ne peut être synonyme d’une refondation de l’Afrique entre Africains restés sur le continent avec les fils des descendants déportés, que si les Etats Africains, créés les conditions réelles et positives favorisant une telle perspective. Et au-delà de la manne financière (investissements et financement des projets), et du knowledge que cela représente indiscutablement, peut redonner un véritable et salutaire souffle au projet d’union que peine hélas à faire décoller l’Union Africaine et participer au financement de nos économies.
De manière lapidaire et sommaire, voilà un ensemble de raisons historique, politique, économique, culturelle et sociale qui nous font plaider pour la cause de citoyens africains à multiples nationalités.
Nous exhortons pour ce faire, nos gouvernants, particulièrement ceux du Cameroun, de sortir le pays de l’anachronisme politique et des textes, pour se pencher sérieusement sur cette importante problématique et placer le pays dans une réelle perspective d’émergence.
Chrétien Tabetsing